Sécurité : La condition physique en plongée

Par Pascal Bernabé

Vous n’avez jamais vu l’un de vos compagnons de palanquée être victime d’un essoufflement parce qu’il a palmé pour essayer de lutter contre le courant ou pour rejoindre le bateau en surface ? La plongée est un loisir, mais un loisir sportif et comme à chaque fois que l’organisme est est exposé à un environnement inhospitalier, il vaut mieux posséder un minimum de condition physique pour que la plongée se déroule dans les meilleures conditions et laisse un souvenir impérissable…

Depuis de nombreuses années, les sommités de la médecine subaquatique, dans leurs études, retiennent comme premier facteur favorisant des accidents de plongée : la fatigue et le manque de condition physique. Le second facteur concerne directement l’effort pendant et après la plongée.

Ces données sont édifiantes et rappellent si besoin était, l’importance capitale d’une bonne condition physique en plongée. Pourquoi s’entraîner à l’effort alors que souvent, la plongée, à priori, n’a pas l’air très fatigante ? Quelques explications très succintes pour vous motiver à rechausser vos « runnings »…

La plongée est une combinaison de deux facteurs de contraintes physiques pour l’organisme. Le premier est l’immersion en elle-même et le second est l’effort fourni lors de cette immersion.

Dès le début de l’immersion, le seul fait d’être dans l’eau et de subir la pression, entraîne d’importantes modifications physiologiques des muscles cardiaque et respiratoires, qui doivent déjà fournir plus d’énergie et travailler davantage lors du cycle inspiration/expiration. La profondeur et la pression qui en découle ne fait bien sûr qu’accroître ces phénomènes, déjà très significatifs à 20 ou 30 mètres. Alors il suffit d’imaginer les effets à 40 mètres et au-delà…

Vient s’ajouter le fait que n’importe quelle plongée, si modeste soit-elle, est génératrice d’efforts, ce qui a pour résultat de consommer de l’énergie et de solliciter l’appareil musculaire, beaucoup plus que ce l’on croit généralement : portage du matériel avant et après la plongée, équipement, palmage en surface ou en plongée, remontée sur le bateau. Des équipements lourds (plongée Tek), des conditions difficiles (mer agitée, eau froide, courant…) n’arrangent rien à l’affaire.

Déshydratation.

Un autre élément, plus insidieux car pas visible au premier abord, est la déshydratation qui se produit au cours de la plongée, du fait de respirer un air desséché. L’air qui arrive dans les poumons est sec ; il est humidifié au niveau des alvéoles et à l’expiration, il ressort chargé d’humidité. Cette déperdition en eau a pour conséquence d’augmenter la viscosité du sang et par conséquence, de ralentir le débit, donc le transport de l’oxygène. Ajoutez à cela l’augmentation de l’effort respiratoire dû à la densité plus importante de l’air sous pression et vous obtenez une consommation d’énergie considérable, liée à une fatigue importante de tout l’organisme. Sur un corps en parfaite condition physique, cette fatigue est facilement récupérée, comme pour tout sportif après une performance. Mais chez un plongeur moins entraîné, ce phénomène se traduit par une grosse fatigue après la plongée et il lui faut un peu plus de temps pour récupérer. Dans le cas extrême du plongeur sénior sédentaire, en mauvaise forme physique et qui arrive sur son lieu de plongée déjà fatigué, le risque de malaise au cours de la plongée est très important et il ne faut pas le négliger.

Il n’est qu’à se rendre compte de l’état de fatigue dans lequel on se trouve après une journée de plongée pour comprendre que cette activité n’est pas vraiment de tout repos. D’où la nécessité de transpirer un peu pour entretenir un minimum de forme physique. Encore faut-il le faire intelligemment…

Un entraînement adapté

Le meilleur entraînement à la plongée reste encore… la plongée ! Pratiquée le plus souvent possible. Si vous ne pratiquez qu’à la belle saison, l’entraînement hebdomadaire en piscine prend toute son importance pour conserver un minimum d’aquaticité et d’acclimatation au milieu aquatique. Il semble indispensable de compléter cet entraînement spécifique, développant en définitive peu les qualités foncières, par un entraînement physique plus consistant.

C’est l’endurance qui est à privilégier, c’est-à-dire la capacité « aérobie », celle qui permet de faire un effort prolongé, mais peu intense. C’est ce type de filière qu’utilisent les muscles lors du palmage, ou encore les muscles respiratoires lors de l’immersion.

L’activité idéale semble bien sûr être la nage avec palmes, en surface ou en immersion. Sur les plans musculaire et respiratoire, c’est le type d’entraînement le plus spécifique à la plongée lors de l’indispensable séance de piscine hebdomadaire.

D’autres sports d’endurance font très bien l’affaire : natation, course à pied, cyclisme pour ne citer que les plus connus et les plus faciles à pratiquer. L’essentiel est que l’effort soit continu, à part pour les débutants, et les séances régulières. Au minimum deux séances d’au moins 20 à 30 minutes au début ou pour entretenir un niveau de base, pour un total de deux heures par semaine. Cela peut s’avérer suffisant pour le plongeur de loisir occasionnel. Mais pour un plongeur plus engagé pratiquant des plongées plus profondes et plus longues, en mer ou en milieu spécial tel que la spéléo ou le lac, l’idéal est de nager, courir ou pédaler 45 minutes à une heure, un jour sur deux, c’est-à-dire trois à quatre fois par semaine, pour un totale de trois à quatre heures hebdomadaires. Un tel entraînement constitue un volume suffisant pour acquérir et entretenir une bonne condition physique.

On peut toutefois encore l’améliorer d’environ 25% avec quelques petits trucs :

  • Inclure une fois par semaine ou par quinzaine une séance plus longue pour améliorer encore l’endurance : 1h30 à 2h de nage ou de cyclisme ou VTT, ou bien 1h10 à 1h30 de course à pied, à faible intensité.
  • Inclure avec la même régularité un entraînement plus court destiné à développer un peu plus sa VO2 Max (consommation maximale d’oxygène des muscles d’un individu en activité), qui rappelons-le, reste le meilleur indicateur de la bonne condition physique de l’individu. Ce type de séance peut être un entraînement par intervalle. Par exemple, pour la course, 20 minutes d’échauffement en endurance où l’on ne dépasse pas 120 pulsations cardiaques par minute, suivies de 6x200m ou 6x400m, ou encore 3x1000m, plus vite, entrecoupés de pauses de 1 à 5 secondes . Le tout est terminé par 5 à 10 minutes de course lente pour le retour au calme. Si l’on a du mal à ne pratiquer que la course ou la nage, il semble préférable de varier, ce qui présente l’avantage d’éviter la monotonie et l’ennui et de favoriser la polyvalence musculaire, très utile en plongée où les efforts sont variés.
  • On aura tout intérêt à compléter cet entraînement d’endurance par une à deux séances de préparation physique généralisée par semaine : étirements (stretching), musculation de la ceinture abdominale et du dos, essentiels pour tous les sports et bien utiles pour la plongée (équipement, portage de matériel lourd…).
  • Enfin, pour terminer et aussi étonnant que cela puisse paraître, il faut ajouter un mot sur la respiration. Sous l’eau, nous sommes tous des insuffisants respiratoires. En surface déjà, beaucoup d’entre nous respirent souvent mal, n’utilisant qu’une faible partie de leur capacité respiratoire. Une respiration efficace se décompose en trois phases : abdominale, thoracique et enfin scapulaire. Une telle respiration se travaille régulièrement et mobilise le diaphragme, muscle fondamental pour une respiration correcte. Il faut apprendre à respirer lentement, profondément et régulièrement en prenant conscience de sa respiration, en la contrôlant. Cette éducation respiratoire est fondamentale pour prévenir l’essoufflement, réguler sa consommation, gérer correctement son stress. Les exercices de yoga consacrés à la dynamique respiratoire sont, entre autres, d’excellents moyens d’acquérir une bonne respiration, de maintenir son diaphragme entraîné et de se relaxer.

La respiration, comme la gestion du stress (relaxation), la diététique et l’hydratation ou encore le sommeil, sont primordiaux pour pratiquer la plongée en sécurité et avec plaisir, qu’il s’agisse d’une balade ou d’une plongée plus technique.

Rappelons une dernière fois les immenses bienfaits de ce type d’entraînement dans la vie en général et plus particulièrement en plongée. Il apprend au corps à mieux mobiliser son énergie et son oxygène. A effort égal, un plongeur sédentaire s’épuisera beaucoup plus vite et consommera plus d’air qu’un plongeur entraîné, sans parler de la qualité des échanges sanguins et tissulaires, ainsi que des incidences sur la qualité de la décompression.

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